Ainsi se réalise le renversement dialectique qui fait du cours une marchandise et un spectacle - une anti-culture de l'esprit - dont diverses entreprises privées peuvent tirer profit. De même les professeurs se trouvent aliénés comme les fantômes d'une justice sans visage - à la fois présents et absents, hors du temps et de l'espace de la présence réelle, hors de la singularité de la rencontre avec leur élèves, et faisant figure symbolique d'organisateurs de la sélection sociale. Les étudiants se trouvent quant à eux réduits au rang de spectateurs et consommateurs de l'information - et leur personnalité se trouve brisée devant l'exigence tacite (l'esprit capitalistico-concurrentiel du concours) de se conformer à la marchandise dans ce qu'elle a de désincarnée, de lisse, d'efficace et de reproductible. La maturation de l'étudiant en médecine s'achève dans sa réussite en tant que numéro, dans la robotisation de sa volonté et de son savoir, qui conserve néanmoins l'autorité symbolique de la sagesse hippocratique par la mise en scène spectaculaire de son annoblissement par l'Institution. (Il pourra d'ailleurs dès la deuxième année s'affairer à réifier aussi ses désirs dans l'exercice frénétique d'une sexualité sans distinction de personne (par l'ivresse, l'esprit de corporation et la déresponsabilisation qui en résulte) et sans rapport sexuel (car le contact entre les chairs sera toujours annulé par un morceau de plastique), et cette frénésie-même sera la forme que prend au rythme de la musique industrielle sa consécration comme véritable machine-outil - perceuse-défonceuse ou bielle à piston.)

Les cours de première année de médecine étant corrompus par l'exigence d'égalité et de reproductibilité d'une société où la marchandise et la machine ont pris le pas sur l'homme - les professeurs sont tenus de dire deux fois le même cours au détail près dans la même journée, doivent rendre leur discours enregistrable/numérisable (adapté à l'oreille du microphone et à l'œil de la camera - qui assurément ne sont ni des oreilles ni des yeux) et ne doivent jamais s'adresser particulièrement/directement aux élèves, qui ne doivent avoir pour eux aucune identité, ni aucune présence (car la plupart d'ailleurs suivent leurs cours sans jamais les voir réellement).

*** (17/11/2015 23:26)
Ici s'est ritualisée l'aliénation dialectique où tout ce qui était directement vécu s'est éloigné dans une représentation.

Ce spectacle en général, comme inversion concrète de la vie, est le mouvement autonome du non-vivant qui se nourrit des hommes réels, se déploie et se perpétue dans une croissance d'industrie et une fécondité de machine. Et c'est ainsi que dans cet univers clos réellement renversé, le vrai est un moment du faux.

*** (12/03/2014 17:13)
Amphithéâtre de référence pour les cours de première année, il est propre et spacieux. Il y règne une ambiance de convivialité et les étudiants épanouis remplissant ses quelques 700 places rivalisent de bonne humeur, d'amitié, de joie de vivre.

Nonobstant, il est de mon devoir de vous conseiller d'aller en propédeutique, car c'est ici que peut avoir lieu la résistance - mettez-vous au premier rang et prennez les cours avec un stylo et une feuille de papier. En effet, vos cours manuscrits seront à jamais personnels, humainement imparfaits (comme chacun d'entre nous) et non reproductibles. Et jamais le système des objets ne pourra s'approprier l'odeur de l'homme, cette odeur qui surgit des aisselles humides de vos professeurs nécessite indiscutablement la présence réelle et la rencontre concrète entre deux singularités humaines, jamais aucune camera ou un quelconque autre instrument technique ne pourra la numériser pour la figer hors du temps et de l'espace. Et si vous êtes chanceux, il se peut que vous receviez des lèvres vermeilles de leur visage l'eau bénite de leurs postillons - sacrement véritable de la réalité retrouvée...